« J’ai fait la connaissance de Gideon dans un grenier de Terezin où il s’efforçait de réparer un vieux piano cassé. Il avait posé le piano sur des chaises pour remplacer les pieds, l’avait accordé, puis il s’installa au clavier. Il jouait pour nous ses morceaux favoris de Mozart, de Brahms et de Janacek. Il forma des ensembles de musique de Chambre d’une qualité telle qu’aucun des participants n’aurait eu à en rougir, même à Prague. Il jouait Bach en soliste dans les concerts qu’il organisait, mais aussi de la musique moderne, les œuvres des autres compositeurs détenus à Terezin et ses propres compositions. Grâce à ses connaissances théoriques et historiques étendues, il mettait sur pied des concerts et des représentations théâtrales. Il se mit à diriger l’orchestre peu de temps avant sa déportation vers Auschwitz. Gidéon était parfaitement qualifié pour l’exercice de cet art : il possédait avant tout une oreille extrêmement musicale. S’il avait survécu, il serait devenu l’un des meilleurs et aurait atteint des sommets de perfection en tant que pianiste, compositeur et chef d’orchestre. »
Le jeune compositeur (il n’avait que vingt-cinq ans) fut ensuite envoyé dans les mines de Fürstengrube toutes proches où il mourut en 1945 juste avant la libération du camp par l’armée russe.
Gideon Klein
